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Musiques et Fantasques Tics Textes, articles et chroniques de musiques et fantastiques.

Galrath (6ème partie) - édition remaniée

Faible, je me sentais faible…Nauséeux aussi. La pluie tombait en rideaux dru sur ma nuque, mon visage encore enfouis dans la fange. Tout mon corps n’était qu’une plaie lancinante allongé dans un marécage puant aux vapeurs délétères. Me redressant péniblement en faisant chuinter la vase tout autour de moi, je repoussais le corps de la moniale qui, dans son dernier souffle, avait lancé une prière de résurrection. A la seconde suivante, elle fut abattue à son tour par l’horreur squelettique que nous avions affrontés. Son sacrifice me fit revenir du royaume de Grenth. Son doux visage ceint de cheveux blond se figeât dans une grimace de douleur pour une dernière fois. 
J’étais seul… parmi les cadavres. Ceux de mes compagnons, autant que ceux de nos ennemis. Leurs contours commençaient à s’estomper, signe que leurs âmes avaient réintégrés une forme physique, quelque part….où du moins je l'espérais.Mais je n’étais pas certain que ce fut à proximité, de toutes façons.

Un silence d’outre-tombe régnait en maître. Le Rideau Noir n’avait jamais aussi bien porté son nom…Un rideau définitif sur les espoirs et la survie des aventuriers intrépides, ou plutôt inconscients, qui s’y aventuraient. Des marécages fétides pompant lentement et inexorablement votre force vitale. Des morts-vivants arpentant des terres maudites sans relâche, jadis habitants d' un empire à son apogée devenue aujourd'hui terre de dégénérescence.
Le passage par les Terres Maudites, à l’ouest du plateau de Nebo, fut long et sauvage. Les Manciens mort-vivants qui y pullulaient nous avaient vraiment mis à mal et nous n'étions pas loin d'avoir baissé les bras. De nombreuses tentatives furent nécessaire pour passer cette région. En reforgeant des alliances, en changeant les équipes, les rôles, jusqu'à l'épuisement. Làs! L'abandon gagnait notre cœur et grignotait nos forces, quand finalement, un dernier essai fut menée sur le fil et nous fit aboutir ici. Au milieu de la zone la plus infecte jamais vue et vécue dans ces terres maudites. Mais nous n'étions néanmoins pas au bout de nos surprises.

Dans cette ambiance sépulcrale, dans l'absence de vie apparente qui m’entourait à perte de vue, le seul bruit continu était la pluie. E
n cet instant la seule chose normale aux alentours. Bientôt, un autre son vint s’y adjoindre. Volontairement léger, mais continu, celui-ci ne laissait aucun doute. Un cavalier avançait au pas dans ma direction. Me redressant sur mon long bâton, je n'avais pas à scruter loin pour apprendre qui, ou quoi, était-il

Il était revêtu d’une armure noire bardée de figures démoniaques, de dents acérées et nimbé d’un halo verdâtre de mauvais augure. Son cheval, décharné à l’excès, était un squelette auquel quelques rares morceaux de cuirs et de chairs putréfiés restaient accrochés par habitude. Devant moi se dressait un seigneur cavalier noir, ainsi qu'un loyal servant de Grenth, le dieu de la mort. L' aura de puissance qui émanait de sa personne était sans équivoque à ce sujet.

- Tu es fort loin de chez toi, petit mage ! Mais n’aie crainte, ta mort...sera longue...et douloureuse ! Sa voix était plus proche d'un souffle glacé hérissant l’échine. S'approchant lentement, son regard vide aux reflets écarlate se fixait avec résolution sur le mien. Une sensation d'impuissance m'immobilisa brièvement.

- Nous servons le même maître, voyons qui, en ce jour, a sa faveur ! Je fanfaronnais. Mes chances étaient fort mince, je le savais. Mais pas inexistante. La vitesse serait mon allié.

Il chargea brutalement avec une rapidité déroutante, dans ma direction. J'articulais rapidement deux brèves incantations, d'instinct, les mots s'écoulant de mes lèvres prestement. Les deux sorts le frappèrent quasi simultanément de plein fouet mais sans effets apparent sur sa course.Un cri impie empli l'air autour de nous et un choc sourd me frappa dans le ventre. La lame de son épée venait de pénétrer mes chairs d'une manière quasi obscène et vicieuse. Une douleur intense me fit presque perdre toutes raisons, me faisant plier les genoux en terre. Je hurlais en ressentant ma vie être clairement aspirée dans la plaie. Du sang me remontait à la bouche et je me tenait les tripes qui manquaient de s'étendrent devant moi.

Il arborait un sourire méchant, un sourire de victoire. Courte et intense. Arrachant l'épée brutalement de la plaie, il porta un second coup brutal en direction de ma nuque, déchirant mes chairs à nouveau dans un mouvement sauvage qui manqua de me décoller la tête. Mais son sourire fantomatique fit rapidement place à la stupeur quand il réalisa que son fluide vital se déversait de lui régulièrement, l'affaiblissant en emplissant mes veines au fur et à mesure que ses coups me frappaient. Mon corps se régénérait maintenant à très grande vitesse. Le simulacre de vie qui l'avait tenu en activité s'éteignait de sa carcasse vide, absorbé par mon organisme. Je me redressait de toute ma hauteur, lentement, l'air mauvais, arborant le sourire de la revanche.
- A mon tour, maintenant ! 
  J’incantais un autre sort qui par le biais de ma vue lui enlevait encore un peu plus de son énergie. Le lien noir qui existait maintenant entre lui et moi me régénérait à une vitesse folle. Il redoublait ses coups avec brutalité qui, quoique douloureux sur l'instant, ne me faisaient que fort peu de dégâts car mes chairs se refermaient systématiquement à la seconde suivante. Dans un cri de rage il se rejeta en arrière en lançant, lui aussi, un sort d’absorption. Mais j'avais eu le temps de lever des protections qui lui enlèveraient encore plus d’énergie au moment même ou il aurait commencé à incanter quoique ce soit. Son sort se retourna contre lui. Son corps décharné était maintenant littéralement déchiré par les lueurs vertes de l'énergie qui circulaient de lui, à moi, déchirant la réalité de son être temporaire.
 
Il réalisait sa défaire, haineux. La fuite, afin de récupérer de l'énergie et de couper le lien vampirique qui me nourrissait, devenait sa seule tactique. J'étais littéralement baigné par son énergie en cet instant et elle me communiquait un pouvoir sensuel et grisant. Un sort me vint spontanément sur le bord des lèvres. Le mot de commande fusa comme un coup de fouet, la syllabe crevant les réalités entre son plan et le notre.Une boule de feu se matérialisa devant moi à toute vitesse, le cueillant en pleine course. J'aurais juré avoir entendu, l'espace d'un très court instant, un dernier cri de peur à l'endroit ou se trouvait maintenant la trace de son avatar, vaporisé par la chaleur. Sa présence, par contre, s'était définitivement éteinte.

Je m’approchais alors de la trace de sa dépouille et scanda une invocation aux sonorités désagréable à l'oreille. Ce chevalier avait été détenteur d'un sort puissant qui lui avait été communiqué par Grenth lui-même. La création de Démons-squelettes à partir des cadavres de ses ennemis! Un avantage certain dans cette région.Retourner les corps physiques des ennemis et amis tombés en une arme puissante...voilà ce que je désirait par dessus tout ! …mais la seule restriction était la nature des corps : uniquement ceux fait de chairs et de sang. Ce n'était pas si restrictif que çà, finalement.
Ma victoire m'y donnait le droit d'y prétendre : tel étaient les termes entre servants du dieu de la mort. Le survivant pouvait s'octroyer le pouvoir du déchu, en l'absorbant; ce que je fit.


Sur ma gauche, j’entendis alors des pas de course venir dans ma direction. je venais de m'écrouler comme un pantin désarticulé, vidé en ayant dépensé mes dernières énergies. J’étais fatigué, désorienté, seul, dans cette région maudite. S’ils étaient plus qu’un, je ne ferais plus le poids à présent.
  Mon groupe était détruit. Le grand guerrier qui m'avait accompagné tout au long de mes aventures avait été un atout remarquable, fauchant ses ennemis à la hache tel les moissonneurs de Grenth, avec précision et efficacité. Il avait été presque un ami, bien que je l’avais berné dès le départ en exploitant son manque de réflexion sans aucun scrupule. Ceci était dans la nature des choses. Les autres avaient été des compagnons efficaces, surtout la servante de Dwayna, la déesse de la chasse. Iris des neiges, s’appelait-elle. Un très joli nom pour une très douce compagne d’aventure, une des rares qui réussi à casser temporairement ma bulle d’inflexibilité. En tout cas, c'est ce que je lui fit croire. Son esprit s’en était-il allé définitivement chez Dwayna ? Ou avait-elle réussi à revenir vers un des nombreux portails de résurrection ? Je ne ressentais aucunes présences d'eux, ce qui était inquiétant.Inquiétant, et inhabituel.

Les pas se rapprochaient, rythmés, constants, méthodiques. Si c'était un ennemi, il était résolu mais de forme corporelle. Ceci m’avantageait. Une forme, haute et élancée, se découpa dans la brume environnante. Je relâchais ma garde et poussa un soupir de soulagement.C'était un rôdeur habillé d’un long manteau de cuir tanné, un de ces coureurs de landes inlassables.

Accompagné d’un fauve immense au pelage brun laissant saillir une musculature puissante, le rôdeur ne m'était pas inconnu. De réputation, en tout cas.

- Alors Mage, un bout de route ? Lança-t-il brièvement.

- Sans aucuns doutes. Répondis-je, en lui emboîtant le pas. 

Je le connaissais, en effet, quoique n’ayant jamais œuvré avec lui. Nous partagions des caractères assez similaires. Peu loquaces, concentrés sur le but de nos quêtes et extrêmement exigeant des autres. Donnant peu de nous-mêmes, aussi. Lui, par définition, préférait la nature sauvage aux présences humaines. Moi, la solitude était ma meilleure compagne pour mes recherches.

Son nom était Cherche-mort, un nom bien rare et Inhabituel.Mais un nom pleins de sous-entendus létaux pour ses ennemis. Le fauve était appelé Therion. A eux deux, ils faisaient un duo mortel.

Il s’arrêta brusquement en fin de marécage et huma l’air, semblable à l'animal qui l'accompagnait.Les poils du fauve se hérissait sur son échine.

- Derrière ce talus, il y a un ennemi. Grande taille...osseux et décharnés, mais puissant. Il montrait la direction devant lui.

- Chevalier Noir ?

- Non, mieux….Un dragon ! Il souriait.

La nouvelle tomba comme une enclume au milieu d’un Lac. Un dragon ? Un formidable ennemi, en effet !

- Que vas tu faire ? j'en connaissait par avance la réponse et je savait qu'elle ne me plairait pas.

- Penses-tu vivre éternellement ? Répondit-il Il repris sa route et embraya sur un pas de coureur de landes, plus rapide, en direction du dragon.

C’était la direction du temple des âges où je me devais d'aller, tout en étant aussi la direction d'un gardien redoutable. Je le regardais accourir vers le danger volontairement ; sans aucune équivoques son nom prenait tout son sens. Différemment, nous étions tout deux fascinés par la mort.

Je pris sa direction, au pas de course. Des hurlements sauvages faisaient échos derrière le talus, un formidable cri empli l'air tout autour....la bataille faisait rage.

…Mais, en effet, je ne pensais pas vivre éternellement.

 

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